François Soleil, ingénieur-opticien (1775-1846)
Augustin Fresnel, dans son Mémoire sur un nouveau système de phares, écrit à propos de la réalisation des lentilles de Fresnel :
Ce qui m'a le plus occupé, ce sont les moyens d'exécution, pour lesquels j'ai été parfaitement secondé par le zèle et l'intelligence de M. Soleil, opticien, qui a courageusement entrepris la construction de ces grandes lentilles.
François Soleil fournit déjà les savants de l'époque en divers matériels d'optique.
Dès 1819, Fresnel sait ce qu'il veut faire, et il lui faut passer à la réalisation. Il contacte François Soleil, un opticien de labeur qui a déjà travaillé pour François Arago. Soleil fabrique alors des lunettes de théâtre, des prismes, des chambres noires, des microscopes et des lunettes micrométriques. Il est déjà bien intégré dans le petit monde des fabricants d’appareils scientifiques qui travaillent pour les membres de l’Académie des sciences. Il a son atelier au 21, passage Feydeau à Paris.
Les commandes de Fresnel sont un changement d'échelle radical pour Soleil.
La demande de Fresnel est délicate car en totale contradiction avec les productions classiques d’un opticien. Ces derniers ne polissent que de très petites lentilles concaves ou convexes (de 1 à 10 cm maximum) alors que Fresnel veut des anneaux qui peuvent aller jusqu’à 90 cm de diamètre. Soleil travaille uniquement à la main « au bassin » dans sa petite boutique, alors que l’usinage des lentilles à échelons va imposer l’emploi d’une machine à vapeur placée dans un grand atelier. Enfin, l’opticien travaille à partir de très petits blocs de verre ou de cristal, alors qu’une lentille à échelon pèse 80 kg.
Soleil et Fresnel vont ainsi, en l’espace de quelques mois, entre 1819 et 1823, transformer totalement le monde de l’optique monumentale avec l’emploi d’imposants tours de polissage, de verres pré-moulés dans des lingotières en fonte et d’ateliers d’assemblage et de mécaniques. Ces spécificités techniques créent un nouveau métier : constructeur d’optiques de phare et un quasi-monopole des industriels français jusqu’au XXe siècle.
François Soleil, opticien du roi
Les puissantes lentilles de Fresnel fabriquées par François Soleil lui valent de recevoir le titre prestigieux d’« Opticien du Roi ». Cette activité n'est pas la seule de l'entreprise familiale de François Soleil, qui continue par ailleurs à fabriquer des instruments d'optique pour la recherche. En 1838, l’activité « phares » est vendue à Adélaïde et Jean-Jacques François, respectivement fille et gendre de François Soleil. Cette activité suivra alors sa propre trajectoire puisqu’elle intègrera l’entreprise Sautter et Cie qui connaîtra un essor important avec, notamment, l’application aux phares de l’éclairage électrique. Lors de l'exposition universelle de 1889, l'entreprise annonce avoir équipé 2061 phares lenticulaires. Cette société ne disparut qu'en 1963.
Sources de cette page : Soleil, opticien à Paris, sur le site du ministère de la Culture ; l'article Jean-Baptiste Soleil de la revue Photoniques ; Sautter, Lemonnier & Cie, exposition universelle de 1889
Les autres acteurs
à l'origine des
phares lenticulaires.